
Découvrir le patrimoine
Les fonds patrimoniaux
Une bibliothèque telle que celle de Rennes Métropole a plusieurs missions. Mettre à la disposition du public livres, revues, disques, partitions, et répondre à ses besoins documentaires est sans doute la première. Mais il ne faut pas pour autant négliger la seconde, qui consiste à conserver le patrimoine écrit et graphique d'hier et d'aujourd'hui.
Les fonds patrimoniaux sont ceux envers lesquels cette mission de conservation s'exerce tout particulièrement. Il s'agit de conserver des documents qui ont traversé les siècles passés et que l'on doit s'efforcer de transmettre aux siècles futurs ; il s'agit également de constituer des collections représentatives de la production actuelle, de garder une trace des textes, des images, et même des sons de notre époque, de notre région.
Problèmes de conservation
Tous ces documents sont fragiles. Afin de les conserver le plus longtemps possible, il existe un certain nombre de règles à respecter, des précautions à prendre. Il ne s'agit nullement d'en empêcher la consultation, mais de les conserver et de les communiquer dans les meilleures conditions possibles, pour permettre aux lecteurs de demain d'y avoir accès également.
Acidité des papiers
Le premier danger qui menace le patrimoine écrit est l'autodestruction : depuis le milieu du XIXe siècle, on ne fabrique plus le papier à partir de chiffons, mais de bois, ce qui donne un papier acide et qui se décompose tout seul quelles que soient les conditions de conservation. Les livres de la fin du XIXe siècle ou du début du XXe siècle sont souvent en très mauvais état, leur papier est devenu jaune et cassant, il tombe en poussière et l'on en perd des morceaux à chaque fois que l'on tourne les pages. Les documents les plus fragiles sont les journaux de cette époque, dont le papier est non seulement acide, mais également de très mauvaise qualité à l'origine.
Les solutions
Il n'existe pas vraiment de solution miracle à ce problème. Des techniques de désacidification du papier ont été mises au point depuis quelques années. Mais elles coûtent chères et sont encore peu pratiquées. Dans la plupart des cas, on protège les documents en les mettant en boîte ; lorsque leur état devient trop critique, il faut alors en interdire la consultation directe, et proposer au lecteur des supports de substitution, à savoir microfilms ou microfiches, afin qu'il puisse toujours avoir accès aux textes. Une campagne de microfilmage de la presse ancienne a été menée en Ille-et-Vilaine par les Bibliothèques municipales de Fougères, Rennes, Saint-Malo et Vitré et les Archives départementales, en collaboration avec la Bibliothèque nationale de France.
Un peu d'histoire
1733 : Création de la bibliothèque des Avocats au Parlement de Bretagne ; elle s'installe en 1759 à l'étage supérieur du présidial de la ville (l'actuel Hôtel de Ville).
1789-1792 : Confiscation des biens du clergé et des émigrés. Les livres sont regroupés dans les dépôts littéraires.
1795 : Ouverture au public des dépôts littéraires.
1803 : Création de la Bibliothèque publique de Rennes, à partir des collections des dépôts ; elle s'installe dans les locaux de l'ancienne bibliothèque des Avocats.
1823-1843 : Publication du premier catalogue imprimé de la Bibliothèque
1910 : La Bibliothèque municipale emménage dans les locaux de l'ancien séminaire, confisqués en 1905 ; elle les partage avec la Bibliothèque universitaire.
1943 : Institution du double dépôt légal éditeur/imprimeur. La Bibliothèque municipale de Rennes devient bibliothèque de dépôt légal-imprimeur.
1956-1958: Construction d'un nouveau bâtiment rue de la Borderie et déménagement.
1992 : Lancement de l'informatisation.
2006 : Installation de la Bibliothèque aux Champs Libres.
On sait de nos jours fabriquer des papiers neutres, dits aussi papiers permanents. Il est important de sensibiliser les papetiers, les imprimeurs, les éditeurs, mais aussi les lecteurs à ces problèmes d'acidité du papier, et de favoriser l'utilisation des papiers neutres à plus grande échelle.
Les conditions de conservation
Les papiers et cartons des livres, les cuirs des reliures sont des matériaux fragiles et périssables. L'exposition à la lumière excessive fait disparaître les couleurs et les encres, voire "brûle" le papier. L'humidité permet à des moisissures et autres champignons de se développer, mais une trop grande sécheresse n'est pas recommandée non plus : un air trop sec fait éclater les cuirs des reliures et fragilise le papier.
La chaleur et le froid dessèchent les papiers et les cuirs, détachent les ors des reliures. La pollution atmosphérique accélère le jaunissement des papiers, et la poussière attire les insectes, qui se nourrissent du papier et creusent des galeries dans les livres.
Les précautions à prendre
L'idéal est de conserver les ouvrages à l'abri de la lumière, dans un local où règne une température de 18° C +/- 2° C, et où le taux d'humidité dans l'air est de 55 % +/- 5 %. Il faut régulièrement dépoussiérer rayonnages et ouvrages, et entretenir les cuirs des reliures en les cirant avec des cires spécialement adaptées à cet usage.
Si les ouvrages sont trop abîmés, on peut là encore proposer des supports de substitution au lecteur. Lorsque les dégradations sont importantes et que l'ouvrage est précieux, on peut envisager une restauration. Face à la prolifération de moisissures ou à une attaque d'insectes, il faut désinfecter ouvrages et locaux avant d'envisager tout autre action.
Lexique
- Anonyme : ouvrage qui ne comporte pas de nom d'auteur, ou qui a été rédigé par plus de trois personnes.
- Coiffe : morceau de cuir (ou de toile) replié en haut et en bas du dos d'un livre.
- Dos : partie du livre qui correspond à la couture des cahiers, à l'opposé de la partie "qui s'ouvre".
- Édition originale : première édition d'un ouvrage.
- Estampe : terme générique désigant tous les moyens de reproduction d'une image (gravure, lithographie, etc.).
- Incunable : livre imprimé au XVème siècle (avant le 1er janvier 1501), qui remonte donc au "berceau" de l'imprimerie (du latin incunabulum, le berceau).
- Lutrin : petit pupitre.
- Microforme : terme générique désignant microfilms et microfiches.
- Mors : charnière entre le dos et les plats d'une reliure.
- Onomastique : science des noms de personnes et des noms de lieux.
- Plat : chacun des deux côtés de la couverture d'un livre.
- Systématique (catalogue) : catalogue où les documents sont répartis dans un système de classification préétabli (ancêtre du catalogue matière).
- Tapuscrit : document tapé à la machine à écrire.
Bibliographie
Histoire de la Bibliothèque
- D. Maillet, Origines de la Bibliothèque de Rennes, Rennes, Vatar, 1845.
- X. Ferrieu, "La Constitution des fonds de la Bibliothèque municipale de Rennes", dans Charpiana : Mélanges offerts par ses amis à Jacques Charpy, 1991.
- Voir aussi la notice consacrée à la Bibliothèque municipale de Rennes dans Patrimoine des bibliothèques de France : un Guide des régions. Volume VIII : Bretagne, Pays-de-la-Loire, Poitou-Charentes, 1995, pp. 210-221.
Conservation et restauration
- C. Adam, Restauration des manuscrits et des livres anciens, Puteaux, Erec, 1984.
- Conservation et mise en valeur des fonds anciens, rares et précieux des bibliothèques françaises, Villeurbanne, Presses de l'ENSB, 1983.
- S. Ipert, M. Rome-Hyacinthe, Restauration des livres, Fribourg, Office du livre, 1987.
- L. Marmonnier, B. Pras, Du papier pour l'éternité : l'avenir du papier permanent en France, Paris, Cercle de la Librairie, 1990.
- J.-P. Oddos ( et al.), La conservation : principes et réalités, Paris, Cercle de la Librairie, 1995.
- Le papier permanent, les nouveaux enjeux de la conservation : actes du colloques de Nîmes, 1990, Nîmes, CLLR, 1992.